Antoine, partenaire au Pérou

Antoine, notre partenaire locale au Pérou

Antoine, notre partenaire français installé au Pérou, se livre à notre interview et nous révèle sa passion pour ce pays à l’histoire aussi riche et surprenante que ces paysages, témoins des 5 000 ans de civilisations andines…

Ton identité

Antoine, d’où viens-tu ?

Je suis français, mais j’ai toujours pensé que le lieu de ma naissance n’était pas très important parce que la seule chose que j’ai fait sur le lieu de ma naissance c’est y naître et y passer les 6 premiers mois de ma vie. Ça c’était en Normandie dans la capitale des Terre-Neuvas à Fécamp, petit port de pêche normand un peu plus au nord des falaises normandes. Après avec le travail de mon père on a vécu en Belgique, à Calais, à Martigues, puis à Versailles, à Vienne puis je suis parti à Chamonix. En général je fais un gros raccourci et je dis que je suis de Chamonix pour pas avoir à expliquer toute cette histoire parce qu’en fait c’est à Chamonix que j’ai commencé à vivre, à tout apprendre, à tomber bien entendu dans tous les pièges… je suis arrivé à 17 ans, je voulais faire de la montagne, du ski, de l’alpinisme, et j’ai fait tout ça mais j’ai aussi beaucoup fait la fête !

Randonnée avec notre partenaire local au Pérou

Notre partenaire

Ta relation avec vision du Monde

Comment as-tu connu Vision du Monde ? Qu’est-ce qui t’a incité à travailler avec notre équipe ?

C’est un peu le destin parce que je ne connaissais pas Laurent Besson, mais je connaissais Sylvain Philippe avec qui Laurent avait été associé avec Pascal Lieuq sur Hommes & Montagnes. Mais à ce moment je connaissais surtout Sylvain. Je ne me souviens plus du tout comment est-ce que Laurent en est arrivé à me contacter, mais ça c’est fait petit à petit et puis finalement Laurent a prévu un voyage de reconnaissance avec moi, qu’on a fait au mois de Septembre l’année dernière.

Culture et tradition Andine au Pérou

Immersion andine

Le Pérou, ta passion, ton pays

Lors de notre dernière discussion, tu disais vivre au Pérou depuis maintenant 20 ans. Qu’est-ce qui t’a incité à t’installer ici ?

En fait ça fait 20 ans que je suis venu au Pérou pour la première fois. En collant les morceaux depuis 20 ans, j’ai peut-être passé 12 ans au Pérou, mais mon départ de France et le lien que j’avais avec la France s’est distendu au fur et à mesure des voyages, mes voyages hors de France étant de plus en plus longs. Je suis véritablement installé au Pérou depuis 16 ans. Les quatre premières années je venais y passer une bonne période de l’année, je passais quand même 6 à 8 mois par an, le reste du temps j’allais dans d’autres pays car j’étais accompagnateur de voyages pour différents organismes français, et puis j’ai rencontré ma femme et quelques années plus tard j’en suis venu à m’installer définitivement au Pérou. Donc pour raccourcir de nouveau, je dis que ça fait 20 ans que je suis arrivé au Pérou !

Mais le Pérou c’est avant tout un rêve de gosse. Quand j’avais 9 ans, j’ai entendu des mots qui ont résonné dans ma tête étrangement : Titikaka, Cuzco, Pérou … Et à partir de ce moment je n’ai plus arrêté de lire et regarder tout ce que je pouvais sur le Pérou, les Incas, les civilisations précolombiennes, sur la conquête. Je passais des journées entières avec mon doigt sur les cartes du Pérou, sur les Atlas à prononcer les noms d’Ollantaytambo, Huancayo, Cusco, Andahuaylillas et compagnie.

Pérou, en bordure du lac Titicaca

Le lac Titicaca

C’est donc tout ce côté historique qui te passionne sur le Pérou, ou bien il y a d’autres facettes de ce pays qui te fascinent au-delà de la culture Inca?

Il y a eu bien évidemment tout l’imaginaire qu’on peut avoir sur le Pérou ! Mais c’est surtout ces mots qui ont eu un impact étrange sur moi. Lorsque j’ai finis mes études je n’avais aucune possibilité d’aller voyager au Pérou. J’ai fait une fête de fin d’études et là un ami m’a dit « Antoine, est-ce que tu veux aller au Pérou ? », bien évidemment je lui ai répondu que non, j’étais fauché ce n’était pas possible. Mais il m’a répondu que j’irai en travaillant. Je suis parti en stop et la personne qui m’a emmené était la responsable des accompagnateurs de Nouvelles Frontières et ils avaient besoin de quelqu’un pour accompagner un groupe au Pérou dans une semaine parce que leur accompagnateur était tombé malade.

Résultat, une semaine après j’étais avec mon budget et mon groupe comme accompagnateur de voyage pour la première fois au Pérou. Après je suis rentré, et ils m’ont renvoyé au Mexique, Pérou, Bolivie… Tout m’a toujours ramené au Pérou, c’est un peu comme le destin.

Pérou, le Machu Picchu

Le Machu Picchu

Ta vision du tourisme solidaire

Dans la majorité de tes voyageurs, il est possible de rencontrer les communautés. Pourquoi est-ce important de les rencontrer ?

Il y a une composante du tourisme solidaire qui me déplaît, c’est lorsqu’il y a la composante de charité, « Aider les autres ». C’est une composante que je trouve désobligeante par rapport aux peuples qu’on veut soi-disant aider parce qu’il y a toujours cette idée que nous sommes riches, et eux sont pauvres, qu’il faut les aider.

Avec mon activité touristique, je n’aide personne. Simplement, je choisis les gens envers lesquels je vais contribuer à leur économie, mais je ne fais pas de charité, je ne les aide pas. Je préfère contribuer à l’économie de familles indigènes du lac Titicaca ou des communautés de Cusco que de contribuer à l’économie de grandes chaînes hôtelières… En choisissant ces personnes à qui je vais donner un apport économique, je considère que c’est du tourisme solidaire.

Îles flottantes, lac Titicaca, Pérou

Îles flottantes, lac Titicaca

On a toujours cette vision du tourisme solidaire et équitable comme un tourisme pas cher, chez les pauvres, un peu comme de l’humanitaire. On peut faire du tourisme responsable et solidaire en étant dans des lodges cinq étoiles. Il faut tout simplement savoir à qui bénéficie le projet. Par exemple, dans la Quebrada de l’Ausangate, il y a une petite communauté Chilca, ils sont actionnaires d’un produit touristique : cinq lodges dans l’Ausangate qui permettent de faire des treks. Ce sont eux qui travaillent dans les lodges, dans tout ce qui est transport à dos de lamas.  Puisqu’ils sont les actionnaires de ce projet, une partie du bénéfice du lodge leur revient. Le bénéfice pour la communauté est bien meilleur que s’ils vendaient  des nuitées à 20 soles. En plus, la répartition de travail dans les familles leur donne beaucoup plus d’opportunités de travail et donc de ressources !

Il y a des communautés avec qui tu aimes particulièrement travailler ? Avec qui tu estimes que c’est une rencontre vraiment riche ?

Dans les communautés du lac Titicaca, les gens sont d’une paix et d’une sérénité vraiment incroyable. Lorsque quelqu’un s’énerve, dans ce genre de communauté il est tout de suite méprisé, déconsidéré voire traité avec compassion comme un enfant. Pour eux, un être humain ne se laisse pas gagner par des émotions de colère. On privilégie avant tout le dialogue, la paix et l’humilité. C’est quelque chose que j’admire beaucoup chez ces gens.

Et puis aussi les relations hommes femmes qui ont tendance à se dégrader dès qu’on sort des lieux traditionnels, parce que c’est aussi une société en conflit entre ce qu’on appelle tradition et modernité, c’est-à-dire entre leurs traditions et la tradition qui leur est venue imposée, la modernité. Mais quand on va chez les peuples comme les Q’eros, on ne sent pas de violences dans les relations, c’est tout le contraire, on sent une grande paix. Ça donne forcément envie d’y retourner et de partager plus avec eux. En 18 ans de travail avec les Q’eros, j’ai peut-être fait entre quarante et cinquante expéditions chez eux, de dix jours à un mois, voire deux mois et à chaque fois c’est passionnant. Je peux dire que j’ai appris les Andes, le quechua, la culture andine avec eux, et leur vision du monde si particulière qui repose sur une idée toute bête qui est la réciprocité dans les relations, dans les échanges. Cette idée me paraît fondamentale à l’époque où l’on vit où il y a de plus en plus d’individualisme, de conflit, de compétition, de concurrence entre les êtres humains. Leur mode de vie et leur relation humaine c’est plutôt la coopération, l’entraide et solidarité.

Voyage et rencontre avec la population

Voyage et rencontre avec la population

Tes conseils pour nos voyageurs solidaires

Quel(s) conseil(s) donnerais-tu à nos voyageurs solidaires qui souhaitent partir au Pérou ?

Un conseil pour les gens qui veulent venir au Pérou ? Oubliez l’image d’Epinal du petit pasteur avec son bonnet péruvien, qu’on appelle ici le chulyo, sa flûte de pan et son lama. Le Pérou c’est bien plus complexe que ça ! D’abord, ce n’est pas un pays andin, c’est un pays à 60% amazonien, les Andes ne représentent que 30% du Pérou.

La région amazonienne du Pérou

L’amazonie péruvienne

Je leur donnerai un autre conseil qui est de ne pas considérer, ce que nous appelons ici le Gringo Trail, c’est-à-dire le voyage qui consiste à passer des lignes de Nazca à Arequipa, au Canyon de Colca, au Titicaca et à la région de Cusco-Machu Picchu et de dire « Check, on a fait le Pérou ». Quand vous avez fait ce voyage là, vous avez vu même pas 10% du Pérou, il reste encore énormément de choses à voir. Au Nord par exemple, il y a des sites majestueux qui sont presque tout aussi impressionnants que Machu Picchu, dans les montagnes de Chachapoyas, dans la région de San Martin, en Amazonie, dans les Andes centrales… Faire le Gringo Trail, ce n’est pas faire le Pérou, c’est parcourir une petite portion d’un pays qui est grand comme deux fois la France.

Les Salines de Maras, vallée sacrée

Les salines de Maras

Par rapport aux populations, le Pérou c’est un pays extrêmement divers. Cusco n’est pas comme on peut le lire dans les catalogues ou dans les brochures « une ville indienne », c’est une ville métisse où il y a une population très diverse qui vient de partout, qui se mélange et se remélange, il n’y a pas beaucoup d’indiens à Cusco. Indien est d’ailleurs considéré comme une insulte ici, les gens préfèrent dire campesinos, ce sont des communautés paysannes, indigènes.

C’est aussi très réducteur de penser le Pérou comme  le « Pays des Incas ». Avant les Incas il y a quand même eu 4 500 ans de civilisations diverses très puissantes avec des apports culturels incroyables que les Incas ont su synthétiser pour créer leur propre civilisation. On peut parler d’une grande civilisation andine de 5 000 ans et plutôt que d’une civilisation inca, qui n’a finalement duré que 100 ans.

Venir au Pérou c’est surtout rencontrer les gens, partager des repas et des moments avec eux parce que partout où l’on passe il y a des gens très gentils, très accueillants. En général, les péruviens d’aujourd’hui sont enclins à accueillir les visiteurs, ils sont très curieux, ils ont envie d’un échange avec eux. C’est donc vrai que le logement chez l’habitant, participer à des activités ensemble, ça donne lieu à des fous rires, des petites erreurs, des moments d’émotion qui vont au-delà des mots et de la barrière de la langue et qui permettent une autre communication que simplement une communication linguistique…

Communauté des Îles flottantes, Lac Titicaca

Communauté des Îles flottantes

Un grand merci à Antoine pour avoir pris le temps de répondre à nos questions et de nous avoir partagé sa passion sans limite pour le Pérou !

Envie de découvrir les terres sacrées péruviennes ? Rejoignez Antoine sur nos voyages solidaires au Pérou avec Vision du Monde !

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