L’Ouest malgache raconté par un voyageur

Voyage solidaire à Madagascar

Pendant 16 jours, Denis et son groupe parcourent l’ouest de Madagascar sur les chemins troués, tantôt sous la pluie, tantôt sous le soleil chaleureux. Un carnet de voyage solidaire en Afrique sur l’île de Madagascar.

Itinéraire du voyage solidaire à Madagascar

Antananarivo → Antsirabe → Betafo → Manandona → Ibity → Vohimana → Ambavaniasy → Vohimana → Tamatave→ Mahambo → Andasibe → Ampefy → Antananarivo

 

Notre voyage solidaire à Madagascar par étape

Antananarivo, le début du voyage

« Première découverte de Tananarive : un océan de pauvreté extrême. Du monde dans les rues. Des maisons de toutes tailles et de toutes couleurs, entre lesquelles s’étale le vert gai des rizières. Feno, notre guide, nous parle de Tananarive comme d’une ville aux mille contrastes : grandes maisons, petites maisons, immeubles, tout ça mélangé, populations disparates, richesse et pauvreté, reliefs variés, avec ces multiples collines … Un climat malgré tout assez familier, pour un pays si différent. […] »

On ne sait pas où ça commence et où ça finit, avec toutes ces collines, ces maisons disparates, cette absence totale d’unité, d’organisation de l’espace, cet urbanisme étonnamment pagailleux.

Les paysages contrastés de la terre malgache

« Bruits d’humanité, coqs, chiens, enfants, adultes et, plus lointain, le défilé des voitures. Cette nuit, il a fallu se battre avec la moustiquaire plus qu’avec les moustiques. Question d’habitude. Petit déjeuner, toujours communautaire. Nous sommes gâtés par la maîtresse de maison, très gracieuse, qui sait mettre le fond musical qui va avec ! […]

Sur le parcours, nos premières maisons traditionnelles en adobe et toit de chaume. Des zébus, dans les champs et sur la route, attelés à des chariots rustiques, des fours à briques qui répandent dans la campagne leur odeur de combustion de bois. L’aspect visuel des champs se traduit par des damiers diversement colorés : marron lisse juste après la récolte, marron granulé après le labour, vert fluo des pépinières, vert tendre du riz en herbe, vert-jaune du riz à maturité.

Rizières à Madagascar

Rizières au cœur des terres malgaches

Quant à la route, c’est l’affaire de notre chauffeur, Lanto. En louvoyant, il faut éviter à la fois les trous, nombreux et profonds (bien au-delà des nids de poule), les véhicules qui viennent en face et les nombreux piétons qui rentrent du travail des champs, outil sur l’épaule. Feno nous explique qu’au départ pour le travail, le matin, ces outils se portent plutôt à bout de bras avec respect et modestie et au retour, sur l’épaule, pour manifester la fierté du travail accompli.

Nuit chez l’habitant à Madagascar

« Après une petite marche de 10 kms, accompagnée par Lévy, la balade s’achève par un petit séjour dans les baignoires d’eau, très chaude, des thermes. Détente totale.

Nous sommes accueillis chaleureusement au gîte de madame Fy ! Apéritif et des boissons inconnues : jus de carasol et de persil, beignets de banane, de viande, de cresson, de légumes…

Ce soir, surprise annoncée, une petite fête, dehors, autour d’un feu de bois, avec celles et ceux qui travaillent au gîte et d’autres visiteurs. Feno se révèle être un animateur vivant et bardé d’humour. Il nous faut faire preuve d’imagination et rechercher dans nos mémoires un chant mimé français exportable. La surprise non annoncée, qui n’en est pas une pour les gens d’ici, c’est la panne, ou le délestage de l’alimentation électrique de 18h à 21h qui revient juste pour le repas.

Au terme de cette joyeuse animation humaine, les cochons, les grillons, les miaulements étonnamment mâles du chat local, prennent le relais. »

Immersion chez l'habitant à Madagascar

Soirée festive au village avec les habitants du coin

Randonnée sur les pans du Mont Ibity

« La montée est raide et il fait chaud. Nous traversons des cultures, puis une partie rocailleuse qui nous mène au tombeau d’un roi, en pleine montagne. Le sentier nous permet de découvrir la richesse floristique de la région : l’Uapacabojeri, arbre produisant des fruits, hôte du ver à soie.

Peu après l’arrêt pique-nique, nous ne dépasserons pas un chaos rocheux, à environ 2 000 m, où séjourne une colonie de chauves-souris, avec des aigles qui viennent leur rendre visite pour en faire leur repas. Avec une bonne vue et des jumelles, on distingue très bien toute cette activité.

Traversant les restes d’une forêt consumée, nous revenons par un autre itinéraire, moins pentu, plus progressif, magnifique au coucher du soleil, avec les paysages de rizières, les petits ponts de bois constitués de deux simples troncs. »

Un havre de paix à Manandona

« Fraîcheur, pureté, calme… On se sent bien dans cet environnement harmonieux où tous les sons  semblent accordés avec ce que l’on perçoit.

Nous partons à pied dans le village ensoleillé et cheminons jusqu’à la cascade que forme, en amont, le torrent. Nous remontons un peu pour pique-niquer au-dessus des baigneurs, qui profitent des grandes vasques naturelles dans les rochers. Sur le chemin, nous passons par les diguettes qui fractionnent les rizières, puis par les villages.

Maison en chaume à Madagascar

Paysage typique malgache

Dans l’un d’entre eux, nous visitons une association qui travaille de bout en bout la filière soie : les œufs, minuscules, les vers, nourris de feuilles de mûriers, les cocons, que l’on ébouillante avant la sortie du papillon. C’est ainsi qu’un seul cocon permet de filer 600 mètres de soie. Après filage, il reste une masse cotonneuse qui, traitée sur un rouet, donne également un fil, d’un autre type, qui deviendra le fil de trame, parce que plus résistant.

Avant notre deuxième nuit au gîte de Bako-Bako, une fête-rencontre est prévue avec les jeunes et les enfants des villages alentours. Soirée d’enfer autour d’un feu gigantesque. Animation assurée par Jean-Lamour, qui nous explique en détail l’origine des chants et danses folkloriques de la soirée. Chorale, orchestre local avec instruments traditionnels à cordes, dont on entend surtout la batterie, qui écrase tout. Une quinzaine d’enfants de 2 à 16 ans, qui chantent et dansent. Craquants !

Voyage équitable à Madagascar

Jeune malgache croisé sur les chemins

Très vite, on se retrouve tous à danser avec eux autour du feu. Tout se termine avec l’hymne national malgache, dont les paroles nous sont traduites par Jean-Lamour. Une sorte de prière belle et émouvante. Après ça, impossible de dégainer notre agressive Marseillaise ! »

Dans la forêt tropicale de Vohimana

« Nous dînons, au cœur de cette nature envoûtante, environnés par le fracas du torrent et, de temps à autre, de ce train invisible sur la voie ferrée. A coups de faisceaux de lampes électriques, nous essayons de faire phosphorer les yeux globuleux des petits lémuriens dans les arbres qui bordent la terrasse. Mais, ce soir, ils ont décidé de ne pas se montrer aux vazas.

Hébergement chez l'habitant à Madagascar

La forêt luxuriante de Vohimana

Le lendemain, nous avons rendez-vous avec les acteurs de « l’homme et l’environnement». Les présidents des 9 associations qui œuvrent sur cette zone : production d’huiles essentielles, surveillance des brûlis, coutume paysanne durable comportant des risques pour l’environnement, qu’il faut parvenir à maîtriser, en passant notamment par la formation des jeunes. Quels que soient les résultats, modestes et inégaux, beaucoup de volonté, de courage et de solidarité.

Le bus nous attend à la sortie du petit pont pour nous ramener à notre point de départ. Nous traversons, le torrent, à gué et à pied un peu plus en amont pour faire halte à la pépinière où nous attendent les plants d’arbres que nous devrons mettre en terre l’après-midi.

Il y a là des plants à pousse et ombrage rapides, des plants à racine profonde, des plants à pousse lente qui donneront des arbres de longue durée, toutes ces catégories devant être savamment combinées pour s’entraider. Nous ne traiterons qu’une infime partie des 5.000 plants stockés ici ! »

Randonnée dans la forêt à la rencontre des Indri-indri

« Nous partons vers 7h15 à pied dans la forêt avec Régis, notre guide pour cette journée. Il est prévu un tour de la réserve par l’itinéraire « indri-indri », le nom des lémuriens de grande taille, les plus corpulents de l’île. Nous commençons par un itinéraire bien aménagé, franchissant trois ponts, puis nous pénétrons dans une végétation très dense où le sentier se fait beaucoup plus modeste et les obstacles plus nombreux, entre racines qu’il faut enjamber, troncs et branches sous lesquels il faut se baisser. On ne peut choisir entre trébucher et se cogner le crâne et il faut parfois subir les deux.

Vohimana à Madagascar

Randonnée dans la forêt de Vohimana

Au loin, les clameurs puissantes et expressives des familles de indri-indri qui se disputent leur territoire. A quelques 30 ou 50 mètres, 3 ou 4 lémuriens batifolent dans les arbres avec une aisance d’acrobates. Sous nos yeux, une jolie petite grenouille colorée en bleu-jaune-rouge.

Lémurien à Madagascar

Lémurien dans la forêt

A l’arrivée, les douches sont bienvenues avant l’accueil de Pascal, président de l’association des jeunes. Il nous explique, la formation au développement durable, les animations, le financement par « les hommes et l’environnement » et, très modestement, par nous-mêmes, par le biais de Vision du Monde.

Le lendemain, Madame Clarisse et l’association des femmes sont venues nous enseigner certaines tâches dont les habitantes d’ici sont coutumières. Cela commence par le tissage du raphia dont nous parvenons laborieusement à produire chacun quelques centimètres carrés, très loin de la natte ou du panier !

Rencontre avec la population malgache

Portraits de jeunes femmes malgaches

Je retrouve mon rôle de mauvais élève, face à ce travail complexe qui demande de combiner astucieusement des fibres indociles. Grâce à nos monitrices, nous pourrons ramener un petit souvenir selfmade. Nous passons ensuite, en spectateurs, à la fabrication de confiture d’ananas : 1,6 kilo d’ananas coupés en petits cubes, 1 kilo de sucre, cuisson lente sur feu de charbon de bois, mise en pot, étiquetage, stérilisation des pots pour assurer une conservation de plusieurs mois. »

Des rizières à l’océan Indien

Après plusieurs kilomètres de piste, nous parvenons à notre hôtel au bord de l’océan… Des bungalows parsemés dans un grand jardin tropical abondamment fleuri, entretenu à la pince à épiler. Épuisés par la route et le dépaysement, nous sommes heureux de cette accalmie dans un cadre idyllique et confortable, avec salle de bainprivée, eau chaude, électricité, même si le groupe électrogène prend congé dès 22h30.

Pour la nuit, le bruit du vent et de la houle a remplacé celui du torrent et des grenouilles.

Un ingrédient précieux pour des vacances de qualité : c’est la nature qui a le dessus !

Couleur de l’eau, esthétique des vagues qui viennent s’éclater sur les rochers, végétation délirante et baignade bien agréable dans un coin idéalement tranquille. Nous jouons un bref instant à nous poursuivre avec des enfants, ravis, qui font tourner leur petit moulin à vent confectionné avec des morceaux de feuilles de bananiers.

Sur les bords de l'Océan Indien

Les couleurs éclatantes des paysages de l’Océan Indien

Nous prolongeons cette parenthèse de confort par un apéritif puis par un dîner couleur locale : carpaccio de zébu, crocodile…

Pour notre dernière matinée, nous nous réveillons dans un bain de conversations d’oiseaux, chants insistants, musicaux et variés, bavardages, échanges sur fond de houle marine. On écouterait ça des heures et des heures, tellement c’est beau et expressif. »

Le voyage équitable et solidaire à Madagascar en résumé

« Un accueil exceptionnellement chaleureux, que ce soit dans les gîtes, dans les guest-houses, au bord des chemins et des routes, de la part de nos différents accompagnateurs et même dans cette école, brièvement visitée. Une pauvreté extrême, selon nos critères occidentaux et les données statistiques, souvent très visible de par l’habitat, l’habillement, les équipements agricoles et manufacturiers… Une apparente joie de vivre, un dynamisme, une sérénité, une dignité …

On ne peut qu’être étonné, et choqué, par le contraste entre les richesses naturelles, productions minières et agricoles, et le dénuement de la grande majorité des habitants, l’état des infrastructures et des équipements.

Production de riz à Madagascar

Travaux agricoles dans les rizières

Sur quelques lustres, la dégradation est nettement perceptible. L’incompétence des dirigeants et la corruption en seraient les causes principales, auxquelles il faudrait ajouter le désintérêt des puissances occidentales pour le développement du pays, l’exploitation minière ne se faisant pas à son profit. Les ONG sont nombreuses, actives et nécessaires pour soulager ces carences. Elles peuvent toujours « changer le pansement ». Il n’est pas forcément possible, à leur niveau d’intervention et par le seul effet de la générosité populaire, de « penser le changement ».

Alors, faudrait-il se contenter d’un « indice de bonheur brut » comme on pourrait interpréter le commentaire d’un ami d’origine malgache, médecin, installé en France depuis quelques années ? : « dans les villages, loin des villes les gens sont heureux, parce que le mode de vie et de confort, avec sa simplicité et ses traditions ancestrales inaltérables leur conviennent. Ils ne demandent pas plus que ce qu’ils ont. Ils ne sont en rien attirés par le mode de vie occidental. »

Ce qui incite à méditer sur la notion de progrès, et à se poser des questions sur cette croissance que nous recherchons pour nous-mêmes avec acharnement, en estimant qu’elle est la condition du bien-être de tous. Et pourtant, la vraie misère n’est-elle pas souvent celle de ces paysans qui croient trouver leur bonheur en voulant venir vivre en ville ? »

Beau voyage en somme, de par les rencontres, l’expérience vécue, l’élargissement de notre connaissance du monde et de notre prise de conscience de la diversité, des richesses et des misères de notre humanité.

Voyage équitabel et solidaire à Madagascar

Travail dans les rizières

Nous remercions infiniment Denis pour avoir partagé son carnet de voyage à Vision du Monde et le reste de nos voyageurs.

Retrouvez tous les voyages équitables et solidaires à Madagascar de Vision du Monde !

Les commentaires sont clos.